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Plan de relance européen, lutte contre le réchauffement climatique, espace Schengen… La souveraineté nationale est aujourd’hui en partie cédée aux instances de l’Union Européenne. Or, tous les Etats n’ont pas la même approche de cette altération de leur souveraineté. A ce sujet, le cas de la Hongrie est remarquablement éclairant.

A l’occasion d’une réunion restreinte, la Fondation a échangé avec plusieurs interlocuteurs magyars sur la thème de la souveraineté. Mentionnant que l’histoire influe sur le subconscient de chaque nation, l’affirmation de la souveraineté hongroise provient par exemple de son histoire agitée, entre occupations ottomane, autrichienne, nazie puis soviétique. Ce passif est la source de l’identité et de la culture hongroise ; contrairement à la France, « la nation a précédé  l’Etat ». D’où une approche diamétralement opposée de l’Union, celle-ci étant un moyen d’affirmation de la souveraineté – et non un dépassement de l’Etat-nation – nouvellement acquise depuis la chute de l’URSS.

Fidèle à la ligne souverainiste hongroise, les participants ont rappelé que la souveraineté est avant tout étatique et non européenne. Face à cette Europe qui veut continuer à pouvoir agir dans tous les domaines, face à l’hégémonie des « experts » et des juges, la Hongrie ne souhaite plus être considérée comme un « membre de seconde classe ».

Toute dissemblance appelle cependant à convergence. Une volonté commune émerge d’un dépassement de la dialectique souveraineté / coopération. Tel a toujours été le but de l’Union, le mot parle de lui-même. Il est nécessaire d’arrêter d’opposer – ou – mais plutôt rechercher à unir – et, faire de la diversité une force pour définir et atteindre des buts communs.

C’est dans cette optique que la notion de civilisation européenne a été abordée à plusieurs reprises par les intervenants. Ce concept pourrait être rendu concret par l’élaboration d’une « plateforme commune », creuset des civilisations et des spécificités culturelles européennes.

De part et d’autre, la coopération est au cœur des projets énoncés. Les Magyars proposent de construire une autonomie stratégique européenne, par le biais d’une armée commune. Il est aussi primordial de recentrer les politiques sur des préoccupations nécessitant l’effort de tous, comme la lutte contre le réchauffement climatique.

Ces problématiques sont évidemment traitées dans un contexte qui bouleverse les équilibres établis. La crise de la Covid-19 a  des effets multiformes sur les Etats, entre accroissement du rôle des pouvoirs publics, mise en avant de la thématique de la sécurité nationale et retour des frontières. Cette crise est surtout l’occasion pour les Etats de repenser la mondialisation et de reconfigurer les chaînes de valeur.

La Chine concentre une grande partie des productions délocalisées, ce qui est perçu comme une menace pour les Etats européens. Ce constat est partagé par la Hongrie, qui avait tendance  auparavant à considérer  la Chine comme une alternative à l’Europe occidentale, mais qui  a revu sa politique lorsque la compétition internationale s’est accrue. Il est donc nécessaire de procéder à un rééquilibrage des approvisionnements par la diversification des sources, l’établissement de stocks et la régionalisation de la production.

Face à ces problématiques, le cadre européen, homogène sur le plan normatif, semble  l’échelon de solution le plus approprié. Mais comme l’ont expliqué de concert les différents intervenants, « a-t-on la volonté de comprendre l’autre ? ». Cette question, qui concerne autant la Hongrie que la France, et bien sûr l’Europe, est cruciale. Ce qui est par contre certain, c’est que le monde ne cesse d’évoluer. Si l’Europe ne prend pas le train en route, elle risque de toute évidence de sortir de l’histoire.

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