Billet de Xavier WANDERPEPEN, Director of Rail Transport China Europe, Freight Forwarding Business Unit, FORWARDIS – SNCF
UN MONDE D’APRES ?
Depuis toujours les échanges reposent sur deux piliers, le prix et le produit (la caractéristique ou la qualité d’un produit). Il manque deux piliers, l’environnement et le social.
Ces quatre piliers donneraient un équilibre bien différent à notre monde.
Des explorations sont en cours dans des entreprises avec les RSE (Responsabilités Sociales et Environnementales). De grands groupes ont lancé le chantier du B4IG (Business for Inclusive Growth) porté par l’OCDE. Tout cela va dans le bon sens, mais les contraintes pour changer les règles du jeu économique mondial sont telles que nous restons sur une politique des petits pas.
Il est probable qu’en ayant donné trop de « pouvoir aux consommateurs » pour du toujours plus, toujours moins cher, nous avons créé un cercle inévitable de la Consommation avant les Hommes. Pour ce « toujours plus », nos poubelles débordent d’emballages et de nourriture, notre monde s’est construit sur le gaspillage des ressources, la destruction de l’environnement, et bien peu d’équité dans la redistribution. Pour finalement constater que nous sommes bien vulnérables, nos populations désenchantées, nos excès de cholestérols, d’anti-dépresseurs, et cette pandémie du Covid-19… Trois milliards d’êtres humains ont un genou à terre.
Si nous prenions en compte les 4 piliers, il y aurait une prime au produit plus vertueux en matière environnementale et sociale. Les peuples sont-ils d’accord pour payer plus cher ? il faut l’espérer pour changer cette spirale infernale. N’ayons pas peur de dire qu’il faut payer plus cher certains produits pour consommer moins et mieux. Nous serons en meilleur santé et plus heureux.
Si nous prenions en compte les 4 piliers nous produirions une grande partie de nos masques chirurgicaux, médicaments, et tant d’autres biens en France ou en Europe. Ceci changerait la logique de fabrication d’un jean qui consomme des milliers de litres d’eau et son périple effrayant qui parcourt des milliers de km ; ceci changerait la logique de développement des monstrueux bateaux de croisière qui polluent tant, ou des fermes usines qui apparaissent aussi en Europe, et tant d’autres exemples aberrants…
Si nous prenions en compte les 4 piliers, nous pourrions exporter nos produits de qualité, d’excellence française, sans hormone, sans OGM, pour un commerce plus équitable, et pas en concurrence frontale face aux poulets brésiliens ou aux céréales des USA.
Si nous prenions en compte les 4 piliers, l’Europe changerait ses règlements sur la libre concurrence, et elle pourrait faire face au dumping des panneaux solaires ou des nouvelles technologies de nos partenaires ou concurrents pas toujours fair-play, ne soyons pas naïfs.
Oui, nous attendons les propositions de nos Dirigeants avec excitation, mais nous avons peur, peur de retomber dans le monde d’avant. Les vents contraires à la prise en compte de l’environnement et du social vont souffler fort… Et les « braves » gens seront tentés par des idées de replis ou du « y-a-qu’à-faut-qu’on ». Nul besoin de se fixer des objectifs inatteignables ; pas besoin de la décroissance ni même de la sobriété heureuse pour tous. Gardons nos échanges avec nos amis chinois, américains et d’ailleurs, ils méritent le développement autant que nous car le commerce et la coopération c’est aussi la paix. Gardons ce qui est bon en proposant une transition pour plus de commerce équitable et plus d’écologie.
Nous en avons tellement sous le pieds en réduisant les excès de notre monde que les objectifs des accords de Paris pour la COP21 sont atteignables et les 4 piliers : Environnement, Social, Prix et Produit en sont la clé, c’est une certaine idée d’une taxe carbone et d’une TVA sociale.
Pour cela, il faudra un espoir Européen pour pousser ces idées et des opinions publiques qui croient dans cet espoir. Il faudra entraîner ceux qui ont peur et ceux qui réduiront leurs profits… Et enfin pour que cela marche, il faudra un programme de transition par étape sur un temps long.
Un monde d’après pour l’humanité.
Xavier WANDERPEPEN