Date de la brève : 20 avril 2023
S’il demeure un service public absolument central dans la vie telle qu’elle est organisée dans notre société, il s’agit bien de l’école au sens large (maternelle, école primaire, collège, lycée etc.). L’école structure une bonne partie de la vie personnelle d’un individu : il doit s’y rendre obligatoirement lorsqu’il est jeune, puis y emmène ses propres enfants.
A l’âge adulte ou durant l’enfance, l’école joue donc un rôle clé. Elle demeure en conséquence l’un des éléments fondamentaux pris en compte lors de la réalisation de projets de vie d’habitants d’un territoire. Plus concrètement, les couples et familles qui souhaitent s’installer sur un territoire donné vérifieront systématiquement la présence d’établissements scolaires à proximité car sans écoles, les projets de vie ne peuvent tout simplement pas être menés. Il en va de même des personnes bénéficiant déjà d’un établissement scolaire à proximité et qui apprendrait que celui-ci va fermer : cela remet en cause la totalité des projets de vie des personnes dont les enfants sont scolarisés dans cet établissement et la question du déménagement se pose alors sérieusement.
C’est toute la problématique rencontrée par de nombreux territoires ruraux depuis plusieurs années, les plus reculés, notamment, doivent faire face à une raréfaction de l’offre scolaire.
Ce mouvement de raréfaction de l’offre scolaire s’inscrit dans un phénomène globalement historique. En effet, depuis une quarantaine d’années, la France a vu son nombre d’écoles (maternelles et primaires) diminuer de près de 17 000, passant de 61 373 en 1982 à 44 312 en 2021[1].
Sur la période 2017-2023, analysée dans un rapport de la Cour des Comptes de 2019, le nombre d’écoles dans les zones rurales (dont l’identification est sujette à débat puisque le Ministère de l’éducation nationale se réfère à différentes approches) a diminué de plus de 5%.
TABLEAU 1 : évolution du nombre d’écoles selon leur zone d’implantation
Pourtant, sur cette même période, le nombre d’élèves est resté globalement stable, oscillant entre 7,5 millions et 8 millions. Comment expliquer alors cette diminution de près d’un quart du nombre d’écoles dans notre pays (1982-2021) ? Ce mouvement s’explique par des logiques de rationalisation budgétaire : entraînant des règles de regroupement de classes ou de communes et des suppressions de postes de professeurs.
Pour autant, la réalité de ce phénomène est particulièrement variable au sein du territoire national. Il l’est d’ailleurs au sein de la ruralité elle-même, qui constate de fortes disparités entre les zones rurales très reculées et isolées, et les zones rurales bénéficiant de l’influence d’une grande ville. Finalement, ce phénomène de raréfaction scolaire suit la logique qui est celle des territoires ruraux depuis la fin de l’exode rural : les écoles semblent globalement plutôt se maintenir, voire se créer, dans les zones rurales attractives où la population s’installe, au contraire des zones rurales reculées où la population continue de décroître.
Ainsi, à titre d’exemple, le département de l’Orne qui a vu son nombre d’enfants de moins de 10 ans diminuer de 27% de 1980 à 2018, a dans le même temps vu le nombre de ses établissements scolaires de maternelles et primaires décroître de 58%. La logique est la même dans la Haute-Marne ou dans le Cantal[2].
La présente carte, si elle ne correspond pas parfaitement à la représentation traditionnelle de la « diagonale du vide », montre néanmoins que les territoires ruraux ont, en très grande partie, largement fait les frais du mouvement consistant à la fermeture d’écoles depuis 1982. Au contraire, les pôles d’attractivité traditionnels tels que la région parisienne ou nantaise ou le pourtour méditerranéen, ont bénéficié d’ouvertures de classes ou d’une certaine stabilité.
Dans le même temps, la diminution d’écoles publiques en zones rurales s’explique également par la création des regroupements pédagogiques intercommunaux, destinés à regrouper les écoles en une seule entité.
Si le Ministère de l’Education nationale souligne que cette organisation permet de renforcer la qualité des enseignements donnés aux élèves, de constituer des classes homogènes et de lutter contre l’isolement géographique et professionnel des professeurs, il n’en demeure pas moins que des voix s’élèvent pour souligner les conséquences néfastes du système : temps de transports allongés pour les élèves, absence de constat réel d’amélioration de la qualité de l’enseignement etc. Sur ce dernier point d’ailleurs, la Cour des Comptes notait même, en 2019, qu’aucune étude de la réussite scolaire n’avait accompagné le déploiement des RPI[3].
Certains décideurs publics se sont alors exprimés ces dernières années, en faveur d’une plus grande considération de l’école en milieu rural. Le Président de la République, Emmanuel Macron, a lui-même fait part de son souhait qu’aucune fermeture d’école ne puisse avoir lieu sans l’accord du maire, en réponse aux craintes exprimées lors du Grand Débat National. En réalité, la suppression d’une école relève déjà de la compétence du conseil municipal selon la loi. L’enjeu se situe plutôt au niveau de la fermeture de classes qui, elle, se poursuit et pénalise sérieusement les écoles rurales.
Si le Ministère de l’éducation nationale justifie la suppression de classes par la baisse du nombre d’élèves dans les territoires concernés, il n’en demeure pas moins qu’une fermeture de classe a des conséquences concrètes sur les projets de vie des quelques parents dont les enfants auraient dû en principe être scolarisés : ils se retrouvent à devoir être scolarisés plus loin, posant ainsi notamment des problèmes de transports. De même, ces mouvements génèrent des conséquences sur les activités, parfois économiques, qui y sont liées, telles que les garderies ou les activités périscolaires.
Pour autant, s’agissant de la fermeture de classes, les maires ne disposent pas de pouvoir pour s’y opposer. Ils sont nombreux à le réclamer mais, pour le moment, une telle compétence ne leur est pas accordée.
Si les différents Ministres ont régulièrement évoqué une logique « d’équité territoriale » concernant les fermetures de classes, la réalité se cache peut-être plutôt derrière celle de la soutenabilité budgétaire. Cette logique, qui s’appuie sur une mécanique parfois trop comptable, tablant uniquement sur le nombre d’élèves, ne tient pas compte des réalités des territoires ruraux, dont la densité est nécessairement plus faible, les temps de parcours plus longs et pour lesquels le rôle de l’école est central. Alors même que l’argument principal évoqué est celui de « l’équité territoriale », qui devrait donc s’occuper des difficultés du monde rural, la réalité pratique de l’application de ce principe par l’Education nationale semble tout autre.
Au contraire, au regard des répercussions néfastes sur l’attractivité d’une commune qu’entraîne la fermeture d’une classe, voire d’une école, puisque les questions scolaires sont au cœur des projets de vie, le Ministère de l’Education nationale devrait en réalité appliquer un principe de différenciation, favorisant les territoires ruraux au regard de leurs difficultés propres, d’autant que ces fermetures de classes se jouent parfois à un ou deux élèves.
Pour faire face à ce phénomène d’ampleur qui porte atteinte à l’attractivité des territoires ruraux, en particulier les plus reculés, de nombreuses initiatives locales ont vu le jour.
Certains maires ont alors fait preuve d’initiatives variées, parfois très décalées, pour tenter de sauvegarder leur école dans leur commune.
Ainsi, à titre d’exemple, dans l’arrière-pays niçois, dans la commune d’Ascros qui comptait en 2020, 160 habitants, il fallait au minimum 12 élèves dans la classe pour que l’école ne ferme pas, or elle comptait à ce moment seulement 11 élèves.
Afin d’y parvenir, le maire de la commune a alors proposé à la location 3 logements communaux au prix particulièrement attractif de 200 euros par mois, afin d’attirer les familles. Ce fut un succès puisque l’école a compté par la suite 18 élèves.
Autre exemple dans le Cantal, à Perlan, la commune a vendu 20 parcelles à 5 euros pour accueillir de jeunes couples qui, en contrepartie, eurent l’obligation de construire un logement sur le terrain et de rester au moins 10 ans sur la commune.
Encore plus surprenant, dans la commune de Montereau dans le Loiret, le maire avait pris un arrêté municipal afin de distribuer gratuitement à la population un célèbre médicament prescrit aux hommes souffrant de certains troubles pouvant être problématiques lors de leurs ébats privés… Coup de communication ou stratégie sérieuse, il n’en demeure pas moins que le maire de la commune indiqua quelques mois plus tard qu’onze naissances avait eu lieu sur sa commune, contre zéro dans la commune voisine[4].
Si cette méthode peu orthodoxe prête à sourire, elle montre à quel point les élus locaux peuvent être particulièrement démunis face à la fermeture annoncée de leur classe ou de leur école. L’ingéniosité déployée démontre néanmoins toute leur conscience de l’ampleur de la problématique et des conséquences qu’auraient de telles fermetures sur l’attractivité et la viabilité même de leur commune dans le temps.
Si différentes causes nourrissent la problématique globale du maintien des écoles primaires publiques dans les communes rurales, la question de l’organisation même du parcours scolaire y participe très probablement de manière non-négligeable.
En effet, la scission du parcours entre un premier et un second degré (primaire / collège + lycée) alimente nécessairement la problématique des écoles en milieu rural puisque le collège « unique » a une vocation centralisatrice, qui génère de fait un éloignement géographique pour un certain nombre d’élèves de communes rurales.
Pour lutter contre les effets de cette organisation définie au plan national, s’est répandue l’idée d’éviter cette rupture en proposant des organisations différentes, visant à rapprocher les écoles de leur collège de secteur.
En effet, comme le note la Cour des Comptes dans son rapport de 2019, « les circonscriptions du premier degré, arrêtées par l’Éducation nationale, ne sont généralement pas articulées avec la sectorisation des collèges, délibérée par le conseil départemental[5] ».
Cette idée de jonction entre le premier et le second degré prend sa source dans le concept d’école du socle. Elle peut alors prendre différentes formes, entre l’intégration de classes de CM1/CM2 directement au sein d’un collège, la création d’un établissement scolaire unique regroupant une école et un collège, ou encore « la création d’un établissement sui generis, comprenant un collège, en réseau avec de petites écoles pouvant comporter des classes multi-cours ».
Cette organisation novatrice, en rupture avec la logique habituelle française, a déjà vu le jour dans plusieurs pays européens, dont notamment la Finlande.
Dans les zones rurales finlandaises, elle permet ainsi de « conserver un groupe scolaire incluant l’enseignement du premier degré et l’enseignement du second degré. La possibilité donnée aux professeurs de dispenser des enseignements aussi bien dans le premier que dans le second degré, dans deux ou trois matières, confère de la souplesse à l’affectation des moyens et participe de la réussite de ce modèle ».
La Cour des Comptes mentionne également l’exemple de l’Italie : « dans la région du Piémont, le concept d’école de vallée a également progressé. Dans le Val Ceronda e Casternone, la commune de Vallo Torinese (800 habitants) a regroupé son école dans un ensemble dit d’école de vallée de 400 élèves, réparti sur deux sites. Les élus de montagne préconisent pour les zones non urbaines une réorganisation du système intégrant l’école et d’autres activités. 72 zones pilotes ont d’ores et déjà été choisies ».
De telles initiatives ont également vu le jour en France, notamment dans les zones très rurales. Ainsi, la commune de Jussey en Haute-Saône qui compte environ 1500 habitants, a expérimenté l’école du socle en permettant aux classes de CM1/CM2 de l’école primaire de la commune de passer plusieurs heures avec les élèves du collège qui demeure juste en face. La 2ème étape a consisté à partir de la rentrée de septembre 2022 de regrouper l’ensemble des élèves de l’école et du collège dans le même bâtiment.
S’il demeure encore difficile de mesurer les effets concrets d’un tel dispositif sur ce territoire précis, des signes positifs sont constatés. Néanmoins, les élus locaux notent la difficulté d’associer d’autres communes au projet : le problème du transport se pose à nouveau. La préconisation du présent rapport visant à revoir l’organisation de l’offre de transport, en s’harmonisant davantage avec les logiques de vie, notamment scolaires, prend, ici, tout son sens.
En tout état de cause, si l’on reprend l’exemple finlandais le plus régulièrement cité, il apparaît que ce fonctionnement semble porter ses fruits. Bien sûr, de nombreuses autres particularités propres au système éducatif finlandais contribuent aux excellents résultats des élèves dans le pays, de même que des spécificités propres au peuple finlandais en lui-même.
Pour autant, selon le dernier classement PISA de 2018, la Finlande se classe au 7ème rang, bien devant la France.
Les différentes expérimentations qui ont vu le jour en France ont bien failli avoir une réelle reconnaissance légale puisqu’il a, un temps, été envisagé d’inscrire dans le marbre légal le principe de l’école du socle.
Idée débattue dans le cadre du projet de loi pour une école de confiance, examiné en 2019, celle-ci n’a finalement pas été retenue, au regard des craintes soulevées par les directeurs d’écoles de voir leurs postes disparaître petit à petit avec la généralisation de ce système.
En effet, malgré les apports positifs des expérimentations menées, la Secrétaire d’Etat chargée de l’éducation prioritaire, déclarait en 2021 qu’aucune intégration du principe dans la loi n’était à l’ordre du jour.
Pour autant, ce système n’a vocation à exister réellement que dans les territoires très ruraux. C’est d’ailleurs dans ce genre de territoires que les expérimentations y sont menées.
Face à ce problème, au regard de sa répercussion considérable sur l’attractivité des territoires ruraux isolés, réexaminer la pertinence du déploiement plus massif de ces « écoles du socle » et de leur facilitation technique à travers des financements pour les transports scolaires ou des appuis administratifs aux collectivités et aux directions des établissements concernés, devrait être remis à l’ordre du jour.
Au-delà de la refonte de son organisation, la question de l’école dans les territoires ruraux ne peut pas échapper à une profonde remise en question sur la logique à retenir pour son avenir. Autrement dit, la logique budgétaire doit passer au second plan au regard de l’importance qu’incarne l’école. Tout doit découler de l’idée fondamentale selon laquelle l’école est le premier vecteur de liens sociaux, d’épanouissement et d’apprentissage des valeurs de notre société. Elle est, encore une fois, au cœur de l’attractivité d’un territoire rural, celle qui fait venir les familles, qui créeront de l’emploi, de l’activité associative, une vie et une âme de village… L’école est au centre de tout et doit ainsi être sanctuarisée indépendamment des logiques budgétaires. En effet, si ces logiques ont répondu à un impératif économique, elles ont eu des conséquences désastreuses sur l’école, et plus particulièrement celle en milieu rural. Il faut inverser la tendance en réinvestissant massivement dans l’école de demain, sans quoi il deviendra tragiquement évident qu’un pays sans éducation digne de ce nom est un pays qui creuse les inégalités et accentue encore la fracture sociale que l’on voit d’ores et déjà s’élargir dans des proportions inquiétantes.
Dans le même temps, l’Etat doit pouvoir libérer les énergies locales, en levant les contraintes pesant sur les expérimentations différenciées qui tiennent compte des spécificités des territoires ruraux. Au contraire, l’Etat doit pouvoir les encourager, en les aidant avec des moyens financiers et en permettant aux élus locaux d’être plus souples face au cadre légal existant.
Les expérimentations d’écoles du socle commun en sont le bon exemple. L’Etat doit pouvoir les encourager, sur le modèle finlandais qui demeure une expérience étrangère aboutie et réussie.
Proposition n°1 : Sur le modèle finlandais, généraliser plus massivement dans les territoires ruraux les écoles du socle, en accompagnant techniquement et financièrement les initiatives menées.
La proposition 1 devrait à ce titre intégrer uniquement des classes de CM1-CM2 au sein d’un collège et pour certaines disciplines seulement (mathématiques et français, par exemple). Pour ce faire, il faudrait que deux enseignants soient présents dans la classe (un professeur des écoles et un du collège) pour encadrer le groupe au cas où un clivage se ferait jour tant chez les CM1-CM2 que chez les Sixièmes. Mais les circonscriptions du premier degré ne sont pas articulées avec la sectorisation des collèges… Alors comment faire en sorte que de tels regroupements aient lieu ? Ensuite, pour les plus petits (CP-CE1-CE2), dans les milieux les plus reculés (haute montagne, zone de faible peuplement, etc.) ne serait-il pas possible qu’un enseignant volontaire, retraité ou un bénévole, habitant le village ou ses environs, puisse dispenser des cours à ces enfants isolés moyennant une prise en charge des frais de déplacement de l’intervenant ?
Si, bien entendu, il ne peut y avoir une école pour chaque commune, toutes les solutions doivent être mises en œuvre pour que les très jeunes ruraux puissent étudier et apprendre dans des conditions optimales.
En ce sens, les nouvelles technologies devraient être renforcées afin de combler certaines réalités matérielles inhérentes aux territoires ruraux.
Comme le note la Cour des Comptes dans son rapport de 2019, les territoires ruraux ont tendance à être éloignés des services culturels privés ou publics, tels que les bibliothèques, les cinémas, les théâtres, les musées ou les librairies. C’est pourquoi, la numérisation de l’école dans les territoires ruraux devient un enjeu majeur, afin de renforcer son attractivité mais aussi sa viabilité.
Si des dispositifs financiers ont été mis en place par l’Etat afin de déployer des équipements numériques dans les écoles (tableaux interactifs, ordinateurs etc.), de nombreuses écoles rurales manquent encore cruellement aujourd’hui de ces équipements.
Par ailleurs, le numérique, si les installations d’accès à internet sont, bien sûr, suffisamment déployées et de qualité, devrait permettre de répondre aux problèmes du manque d’effectifs scolaires ou des distances. En effet, des expérimentations de visioconférences pourraient être envisagées, de même que des cours dématérialisés afin de concilier les réalités du monde rural avec les difficultés budgétaires actuelles.
C’est notamment dans cet esprit que le collège de Richelieu, commune rurale située à 60kms de Tours, a expérimenté un cours de Chinois réalisé par une professeure devant ses 6èmes situés dans un collège à Tours, tout en étant retransmise par visioconférence aux collégiens de Richelieu. Quelque peu appréhendé au départ, ce système demeure apprécié car l’ensemble du corps enseignant, des parents ainsi que des élèves prennent conscience de leur chance de pouvoir bénéficier d’un tel cours dans une commune rurale.
Si l’expérimentation a un coût, puisqu’elle a coûté 80 000 euros de matériels, elle fut financée par l’Etat et le département de l’Indre-et-Loire. Aussi, tant la professeure que les élèves reconnaissent que ces cours ne valent pas le contact humain d’un cours en présentiel mais ils en demeurent tout de même très heureux, d’autant que l’enseignante se déplace au moins une fois par mois dans ce collège rural pour maintenir le lien physique.
Ce procédé a, tout de même, l’avantage de permettre aux élèves de bénéficier d’un cours qu’ils ne pourraient pas avoir en temps normal dans un tel territoire rural, tout en évitant à l’enseignante de se déplacer plusieurs fois par semaine à 60kms de chez elle (chose d’ailleurs inenvisageable pour elle)[6].
Si cet exemple concerne des classes de 6ème, il est tout à fait envisageable pour des classes de CM2, voire CM1, qui accueillent des enfants généralement familiers des technologies du numérique (téléphone portable, tablette etc.).
Par ailleurs, la période de pandémie liée au Covid-19 a amené de nombreux professeurs et élèves à se familiariser rapidement aux solutions dématérialisées. Si elles ont surtout concerné des élèves au collège, l’ensemble du pays s’est habitué à ces procédés, de sorte qu’ils pourraient plus facilement être déployés aujourd’hui dans les écoles.
Ce virage numérique nécessite néanmoins d’inclure l’étude des technologies du numérique dans les programmes scolaires et d’en faire un point central d’apprentissage.
Comme le note la Cour des Comptes, « il faut intégrer le numérique dans tous les projets d’école et considérer qu’il fait partie du socle de l’offre éducative, ce qui suppose un effort coordonné sur la moyenne période entre l’État et les collectivités : il en va de la qualité de l’école dans les territoires ruraux[7] ».
A ce sujet, la Finlande demeure encore un bon exemple de réussite dont il serait intéressant de s’inspirer en France. En effet, « grâce à une pédagogie associant les outils numériques et le recours à des manuels d’apprentissage scolaire numériques, les élèves de Finlande passent depuis plusieurs années toutes les épreuves du baccalauréat de manière totalement dématérialisée. Cette situation est le résultat d’une stratégique numérique éducative volontaire, de la part du gouvernement. Elle repose sur la formation à la maîtrise des outils numériques des élèves mais aussi des enseignants. Cette démarche a pour objectif de favoriser l’inclusion numérique[8] ».
Proposition n°2 : Renforcer l’apprentissage du numérique pour familiariser les plus jeunes aux technologies de demain et faire de l’école une véritable école du numérique comme en Finlande.
Proposition n°3 : Stimuler et accompagner financièrement les initiatives visant à déployer des solutions de cours dématérialisés dans les écoles rurales en difficultés.
Toutefois, ces deux propositions doivent être bémolisées. Une école numérique comme en Finlande ne semble pédagogiquement envisageable que dans des cadres restreints. Par ailleurs, des visioconférences et autres cours dématérialisés préconisés par la Cour des Comptes ne vaudront jamais des cours en présentiel qui mettent l’humain au cœur de l’apprentissage… Comment retenir à distance l’attention d’enfants qui, nous le savons, en une heure de cours, ne sont réceptifs qu’un quart d’heure ? En outre, comment empêcher que l’enfant ne se déconnecte ou ne fasse totalement autre chose ? Que faire pour éviter de tels dérapages ? La période du Covid-19 qui a usé et surabusé des cours en distanciel a engendré de graves lacunes chez les enfants, en raison d’un fort absentéisme et d’une grande démotivation au fil des semaines… Il faut donc se garder de faire de l’outil numérique l’alpha et l’oméga de l’enseignement en milieu rural. C’est pourquoi il est nécessaire de revenir à une pédagogie de proximité qui a fait autrefois ses preuves de manière indubitable et qui se décline comme suit :
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Olivier CAZENAVE
Vice-Président délégué de la Fondation Prospective et innovation
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