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Matières premières et décollage de l’Afrique

Date de la brève : 23 avril 2021

Télécharger ici la brève d’informations : « Matières premières et décollage de l’Afrique » 

 

Si l’Afrique est réputée pour ses sous-sols riches et son abondance en matière premières, les défis de croissance restent à relever. En effet, l’Afrique n’est pas parvenue à maximiser ses rentes, à développer ses activités manufacturières, ou encore à diversifier ses économies (faute d’institutions solides, de politiques adaptées, de rigueur…). Aujourd’hui, force est de constater qu’une majeure partie du continent reste « prisonnière » du piège des matières premières et ne parvient pas à réduire sa dépendance à leurs égards.

 

Tour d’horizon des matières premières en Afrique

Matières premières énergétiques :

  • Dans le classement des pays africains producteur de pétrole, le Nigéria se trouve en tête avec une moyenne de 2 millions de barils/jour, suivi de près par l’Angola (1,7 million de barils/jour), l’Algérie (1,6 million de barils/jours) et la Lybie (852 000 barils/jours).
  • En ce qui concerne le gaz naturel, la production est largement dominée par l’Algérie avec 80 milliards de m3, suivi de l’Egypte (50 milliards de m3), et du Nigéria.

Matières premières agricoles :

  • L’Afrique est en tête du marché international de fèves de cacao. Le Ghana et la Côte d’Ivoire sont les deux locomotives et représentent environ 63 % de la production mondiale. En 2019, la récolte en Côte d’Ivoire a atteint 2,2 millions de tonnes.
  • Dans la culture du café, les pays dominants sont l’Ethiopie avec 7,3 millions de tonnes produites en 2019, l’Ouganda avec environ 4 millions de tonnes, et la Tanzanie.
  • Quant à la production de blé, c’est l’Egypte, avec 9 millions de tonnes, qui domine devant le Maroc et ses 5 millions de tonnes.
  • Dans la filière coton, le Bénin se démarque avec ses 730 000 tonnes produites en 2020, suivi de près par le Mali (700 000 tonnes en 2020) et le Burkina Faso (464 000 tonnes en 2019) dont la production est en forte baisse.
  • Dans la production de caoutchouc naturel, la Côte d’Ivoire est le premier producteur à l’échelle continentale avec 624 000 de tonnes produites en 2018.

Matières premières minérales :

  • La Guinée est incontestablement leader sur le marché de la bauxite (5ème producteur mondial) avec une production atteignant 70,2 millions de tonnes en 2019.
  • La majeure partie de la production de nickel est détenue par l’Afrique du Sud (43 000 tonnes produites en 2018) et Madagascar.

Métaux précieux :

  • Dans la filière or, l’Afrique du Sud (118,2 tonnes produites en 2020) a laissé sa place de leader au Ghana et ses 158 tonnes produites.
  • Enfin, la production d’argent est dominée par le Maroc (231 tonnes produites en 2018).

 

Quelle « malédiction des matières premières » ?

  • Selon la CNUCED, l’Afrique est la région regroupant le plus de pays dépendants des exportations en matières premières (46 sur 91).
  • L’Overseas Development Institute définit cette malédiction comme « une situation dans laquelle un pays dispose d’un secteur des ressources naturelles tourné vers l’exportation, qui génère de substantielles recettes publiques mais qui, paradoxalement, engendre stagnation économique et instabilité politique ». Dans de nombreuses économies africaines, l’abondance de ressources naturelles peu ou mal gérée conduit à corruption, surendettement, conflits régionaux, dégradation des services publics etc.
  • La demande internationale pourrait être un facteur positif et contribuer à l’augmentation des prix. Toutefois, l’Afrique subit régulièrement les variations des cours du prix et des productions, ce qui impacte nécessairement toute montée en gamme.
  • Le cas du pétrole est particulièrement marquant : les chutes des prix ont à plusieurs reprises affecté les économies (en janvier 2016, le Brent atteignait 28 $/bl, chute des prix du cacao la même année…).
  • Les pays africains exportent essentiellement – voire exclusivement – des ressources naturelles, à l’image de l’Angola dont la rente pétrolière représente jusqu’à 50% de son PIB.
  • Faute de diversifier leurs exportations, les pays africains risquent de rester en situation de pays « mono-exportateur ». Une diversification économique permettrait d’ouvrir plus facilement ses frontières sans risquer de mettre en péril sa souveraineté économique, d’avoir des solutions de remplacement et d’adaptation pour répondre en cas de choc du produit ou des produits dominants.

 

Quand « matières premières » ne rime pas avec « développement »

  • L’Afrique concentre ses efforts sur l’extraction des matières premières mais ne les transforme que très peu alors qu’il est nécessaire de valoriser le produit en amont et en aval pour en maximiser les rendements.
  • Cette valorisation du sol permettrait au continent de tirer profit de ses rentes et d’en faire une source de croissance. Or, il est frappant de constater l’inertie des modèles de production et de transformation. L’Afrique ne s’étant pas imposée dans la filière de transformation, la valeur ajoutée des produits finis revient aux acteurs extérieurs.
  • Sur ce point, l’exemple du coton est frappant : l’Afrique à la démographie dynamique (et donc une population importante à vêtir), ne transforme que 3 % de sa fibre de coton. Paradoxalement, le continent exporte 97 % du coton produit pour ensuite importer des produits fabriqués à partir de cette fibre (draps, vêtements, toiles, etc).
  • Finalement, la clé pour générer une croissance notable des économies africaines réside dans l’utilisation des recettes issues des matières premières au profit de leur capacité de transformation et du développement de leur secteur secondaire.
  • C’est par ailleurs le défi que s’est fixé la Guinée et son secteur minier (qui contribue à hauteur de 20 % du PIB). Dans une récente interview, le Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana a affirmé mettre en place des projets de raffineries de métaux. Cette filière de transformation industrielle devrait permettre à la Guinée de créer davantage d’emploi et de « sortir d’ici 2026 six millions de guinéens de l’extrême pauvreté ».
  • Promouvoir une économie de production implique d’autres défis que les pays africains doivent relever. Parmi eux le déficit d’infrastructures adéquates ; de transport pour acheminer les ressources naturelles, de réseaux électriques ou technologiques pour engendrer des gains de productivité.
  • Mais aussi, la promotion de politiques industrielles décisives, la formation de main d’œuvre qualifiée et l’acquisition de compétences, l’amélioration du climat des affaires…
  • Bien entendu toutes ces transformations structurelles posent la question des financements requis.

OH

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