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Rapport de l’OCDE sur l’Aide Publique au Développement en 2020

Date de la brève : 23 avril 2021

Télécharger ici la brève d’informations : « Rapport de l’OCDE sur l’Aide Publique au Développement en 2020 »

 

Le Comité d’Aide au Développement de l’OCDE a diffusé le 13 avril 2021 les chiffres préliminaires de l’Aide Publique au Développement (APD) de l’OCDE pour 2020. Les chiffres définitifs seront disponibles en décembre 2021.

L’année 2020 est une année exceptionnelle qui donne un visage particulier à l’Aide Publique au Développement. Des tendances de fond se dégagent cependant qui ne sont pas favorables à l’Afrique, en termes de moyens financiers mis à disposition pour son développement.

 

Une aide globalement résiliente

Le PIB de l’OCDE a reculé de 5,5 %, avec certains pays plus durement touchés que d’autres. Malgré cette récession, l’Aide Publique au Développement a augmenté en valeur absolue de 3,5 % (+ 5,343 Mds de dollars) ainsi qu’en valeur relative par rapport au PIB de 0,30 % à 0,32 %.

Cette augmentation est le fait des pays de l’Union Européenne (+ 7,8 %) mais aussi des États-Unis (+ 4,7 %) et du Canada (+ 7,7 %). Elle a pris principalement la forme de prêts (calculés selon leur équivalent don) où la part dans l’aide bilatérale décaissée est passée de 17 à 22 %, correspondant à près des neuf dixièmes de l’augmentation globale de l’aide publique versée.

L’aide humanitaire – 11 % de l’aide globale – a également augmenté (6 %). Le coût des réfugiés dans les pays donateurs a chuté (- 650 millions USD) pour représenter 5,6 % de l’aide globale contre 6,4 % l’an plus tôt. Selon les premières estimations, les mesures de soutien sanitaire dans la lutte contre la COVID représentent près de 4 milliards de dollars, probablement plus.

 

Une aide plutôt dirigée vers les mieux lotis

Les pays à faibles revenus ont enregistré une baisse de l’APD de 3,5 % par rapport à 2019 : l’APD à l’Afrique subsaharienne régresse de 1 %. A noter cependant que les Pays Moins Avancés (PMA) ont bénéficié d’une hausse de 1,8 %. Ce sont donc les pays en développement les plus avancés qui ont reçu un surcroît d’aide le plus élevé : + 10 milliards de dollars, soient un peu moins de deux fois l’accroissement total de l’aide. C’est dire que l’aide pour les catégories moins avancées a diminué.

Ce surcroit d’aide est constitué surtout de prêts et doit permettre d’atténuer l’impact des sorties de capitaux privés qui ont reculé en 2020 de 13 % (en 2019 les capitaux privés à destination des pays en développement atteignaient 216 535 millions de dollars selon l’OCDE).

 

Commentaires 

  1. L’ensemble des commentateurs – y compris les ONG – ont salué cette résilience de l’APD en ces temps de pandémie. Les urgences nationales n’ont pas détourné l’attention sur l’appui à apporter aux pays en développement. La réaction a été rapide. La France a su se mettre en tête de la mobilisation internationale et montrer l’exemple avec l’Allemagne, en augmentant de 10,9 % son APD.
  2. Mais, cette appréciation positive ne va pas sans nuances qui, elles-mêmes, méritent d’être nuancées :
    • Le Secrétaire Général de l’OCDEa rapproché les 160 milliards de dollars de l’APD aux 16 000 milliards de dollars des fonds de relance économique dégagés en 2020 pour contrer les effets sanitaires et économiques de la COVID-19.
    • La comparaison devrait relativiser et stimuler les efforts consentis par l’APD mais il ne s’agit pas forcément des mêmes données (engagements de dépenses et décaissements) et le développement est une œuvre de longue haleine où l’argent ne suffit pas ; il peut même être contreproductif s’il ne s’inscrit pas dans une approche développementale. Mais, les chiffres sont là et le message est clair : montrer que les pays de l’OCDE ont la capacité de se mobiliser davantage pour le développement dès lors que cela devient une priorité vraiment nationale.
    • L’augmentation des prêtsa été déplorée par certains à l’heure où l’on reparle de la crise de l’endettement. Là également, le principe de réalité ne doit pas être négligé car le prêt n’est pas condamnable en soi. Cela dépend de l’usage qui en est fait, de ses conditions et de son environnement économique. Il doit être réservé et adopté à des emplois productifs, à moyen ou long terme, et s’inscrire dans un cadre macro-économique adéquat.
    • Faute de disponibilités budgétaires, il ne peut être remplacée par des prêts pour les mêmes montants. Il faut certainement combiner dons et prêts pour avoir un effet levier, notamment pour accompagner les dépenses en infrastructures et d’aide aux secteurs productifs.

Faute de données précises, il est difficile de se faire une idée de l’emploi sectoriel des fonds d’APD en 2020. Pour l’heure, les dépenses à caractère social, éducatif ou environnemental dominent quantitativement. Cela correspond à une nécessité dans les États récipiendaires mais aussi à une démarche humanitaire et écologique dans les pays de l’OCDE, soutenue par les opinions publiques. Les priorités affichées dans le projet de loi de programmation français relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales en discussion sont révélatrices. L’objectif visé est d’atteindre une APD représentant 0,55 % du revenu national brut en 2022 (soit environ 15 milliards d’euros) mais le secteur productif y est pratiquement absent ou présent de manière indirecte. Parmi les priorités sectorielles énoncées dans le projet de loi figurent : le renforcement des systèmes de santé, l’éducation, la formation professionnelle, l’agriculture durable, la nutrition, la gestion de l’eau ou encore la gouvernance démocratique.

Ce n’est pas oubli du secteur productif, mais faute de moyens financiers suffisants et d’impossibilité politique et morale à redéployer les montants affectés aux secteurs sociaux, que le secteur productif passe au second plan dans l’APD et est renvoyé à des soutiens d’une autre nature.  Ce n’est pas le cas de nos partenaires-concurrents [Chine, Turquie, Indonésie, Inde…] qui se déploient de plus en plus en Afrique et, à côté du soft power, s’intéresse aux secteurs productifs d’abord. Il est donc important que le secteur productif ne soit pas négligé car la production permet l’emploi et la création de richesses, évidence que rappelle régulièrement des responsables africains.

SD

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