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Vers quel modèle de développement Chinois ?

Date de parution : 13 décembre 2013

Préface de Jean-Pierre RAFFARIN

La Chine du XXIè siècle nous pose une question troublante. Quoi de plus dérangeant que de voir quelqu’un qu’on croyait occupé à vous rattraper vous dépasser et prendre un autre chemin que celui sur lequel on croyait le précéder à jamais?

C’est pourtant bien ce qui se passe. On savait la Chine vingt fois plus nombreuse que la France, ou deux fois et demi plus que l’Union Européenne, mais cela se compensait en termes de PIB par habitant : la Chine mettrait du temps à remonter de la 93è place, juste devant la Bosnie Herzégovine ou la Tunisie avec 4 300 $ par tête environ, jusqu’aux 108 831 $ de chaque Luxembourgeois ou à la 18è  place de la France, dont chaque citoyen est à peu près dix fois plus riche qu’un Chinois.

Or, tel est exactement l’ambition de la Chine : reprendre la première place qui fut la sienne au fil des millénaires jusqu’à la parenthèse des deux derniers siècles. Elle a prouvé sa capacité à le faire en réalisant en trente ans un rattrapage prodigieux, dont la poursuite fera d’elle vers 2030 la première puissance économique mondiale. Mais on se trompe peut être lourdement en ne voyant que l’aspect rattrapage, qui nous séduit par la validation implicite qu’il comporte de notre propre mouvement.

Car la Chine d’après le XVIIIè Congrès du Parti Communiste qui a confié à une nouvelle direction le soin de mettre en œuvre son XIIè Plan tend aujourd’hui à se définir par triangulation, et non plus selon le seul vecteur linéaire d’un rattrapage de l’Occident, qui était le premier but fixé par Deng Xiaoping, dans la ligne encore du Maoisme d’antan.

Le premier sommet de ce triangle de repérage, c’est la relance de la réforme pour aujourd’hui : par sa simple dynamique, la croissance chinoise a créé le besoin d’une refonte de ses conditions pour se poursuivre plus avant : réforme urbaine, réforme financière, réforme juridique, réformes sociales sont à présent requises, voire urgentes.

Le second sommet est alors le passé, dans sa double dimension : d’une part, il propose à la méditation des dirigeants l’exemple d’une supériorité alors incontestée, qu’il s’agit de recouvrer — c’est un horizon mental essentiel, mais qui ne correspond pas du tout à l’idée d’égaler ni imiter l’Amérique. La Chine grandiose dont il s’agit était à son apogée un millénaire avant qu’on ne découvrît l’Amérique, elle n’a donc rien à chercher du côté de cette dernière en termes d’identité ou de réussite à accomplir. Mais il y a d’autre part une seconde leçon du passé, à savoir qu’on peut passer complètement à côté des opportunités majeures amenées par l’histoire et connaitre dès lors humiliation et décadence. La Chine trouve cette expérience dans les années d’attrition qui la réduisirent à ne compter que pour moins de 5% de la production mondiale, elle qui en fournissait le quart depuis toujours ! A l’heure où elle se relève de ce recul historique, elle est spécialement attentive à penser la nature, la portée et les risques des transitions, c’est le noyau de sa résolution dans la conduite d’ une nouvelle transformation majeure.

Cette transformation est enfin à la fois requise et calibrée par un troisième sommet, qui est la conscience lucide de ce que l’avenir de l’humanité ne permettra pas la prolongation de la dynamique initiée par l’Occident, et à laquelle le miracle chinois vient d’apporter une si remarquable extension. Le progrès demain consistera à transformer complètement la manière de vivre de l’humanité dans un sens plus compatible avec les limites de son écosystème planétaire, et un pays qui constitue le cinquième de cette humanité est dans l’obligation d’y travailler le tout premier.

Pour éclairer la transformation de portée historique que la Chine s’apprête à amorcer, nul n’était plus éclairant à consulter que M. Justin Yifu Lin, hier chief economist et senior vice-President de la Banque Mondiale, dont les travaux font référence à propos de la Chine et qui est un conseiller écouté des dirigeants chinois.

En acceptant de venir débattre avec trois éminents économistes français réunis autour de lui par la Fondation Prospective et Innovation et le CERDI que dirige le professeur Patrick Guillaumont, le professeur Lin a de beaucoup dépassé l’analyse du cas chinois pour s’élever à une réflexion sur les conditions générales du développement hier et aujourd’hui.

Le présent livre que la Fondation Prospective et Innovation en tire, comme elle en a l’usage, sous sa seule responsabilité et non à titre d’actes de la rencontre, est ainsi de nature à éclairer sur les enjeux majeurs du XXIè siècle, dont c’est peut être le plus navrant indice pour les Européens de mesurer que ce ne sont plus eux qui les formulent.

Jean-Pierre RAFFARIN
Président de la Fondation Prospective et Innovation

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Informations pratiques

  • Format : 12x20 cm
  • Éditeur : Antidote Editions
  • Nombre de pages : 150
  • ISBN : 978-2-91752-301-8
  • Prix : 10€
  • Version : Papier
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