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Sécurité économique : développer les échanges commerciaux mais avec viligance

Date de la brève : 05 avril 2024

  • La Fondation Prospective et Innovation a décidé de tenir une chronique européenne dans les 2 mois qui nous séparent de l’élection…
  • Les élections européennes se dérouleront le dimanche 9 juin en France.

 

Dans un contexte géopolitique tendu, avec des chaînes d’approvisionnement perturbées, des technologies et des infrastructures souvent attaquées, des répercussions économiques nouvelles de mesures prises dans des pays tiers, la Commission européenne vient d’adopter, le 24 janvier dernier, cinq initiatives en vue de renforcer la sécurité économique de l’Union européenne, tout en garantissant l’ouverture des échanges commerciaux. Ce dispositif est principalement tourné vers les Etats membres afin non seulement de les mobiliser dans cette période de tensions accrues mais aussi d’éviter des mosaïques nationales de législation.

Ces mesures récentes proviennent du paquet global ‘sécurité’ présenté initialement en juin 2023, et qui visait à la fois à protéger l’Union, tout en assurant sa compétitivité, les investissements et le développement de la recherche, et sécuriser ses approvisionnements en signant des accords avec des pays ‘amis’.

La Commission européenne propose tout d’abord de regarder plus attentivement les investissements étrangers réalisés sur le territoire de l’UE, du moins ceux qui peuvent porter atteinte à la sécurité de l’UE. Les services de la Commission se sont penchés sur plus de 1000 opérations (Investissements Directs Etrangers, IDE) et certains trous demeurent dans le dispositif communautaire. Il est d’abord nécessaire que les règles de contrôle au niveau national soient mieux harmonisées. Par ailleurs, les Etats membres doivent aussi se mettre d’accord sur des secteurs spécifiques à scruter de plus près afin d’avoir une approche plus homogène. Enfin, les Etats doivent être particulièrement vigilants pour les investissements étrangers qui sont réalisés par des entreprises qui sont au bout de la chaîne, et souvent issues d’un pays tiers.

La Commission a aussi proposé de suivre plus attentivement les investissements sortants de l’UE, qui pourraient soutenir le développement de certaines technologies (militaires) avancées qui pourraient se ‘retourner’ contre la paix et la sécurité de l’UE. On comprend bien l’intérêt d’une telle proposition mais la réalisation et sa coordination seront difficiles à mettre en place.

La Commission souhaite aussi que les Etats membres exercent un contrôle plus efficace des exportations de biens à double usage (civil et militaire), à commencer par les biens qui n’ont pas été couverts par les régimes multilatéraux de contrôle des exportations en raison du blocage opposé par certains membres. Un forum à haut niveau devrait être prochainement organisé, au cours duquel des recommandations des Etats membres sont attendues avant l’été 2024. Pour aller dans le même sens, l’évaluation du règlement de l’UE sur les biens à double usage devrait être avancée à 2025.

Concernant les investissements dans le domaine de la recherche, la Commission souhaite encourager le développement des technologies à double usage potentiel, et elle a donc lancé une consultation publique dans cet esprit. Outre les programmes communautaires existants, structurés notamment autour de ‘Horizon Europe’, la Commission réfléchit à la mise en place de nouveaux programmes spécifiques axé sur les biens à double usage potentiel.

Dans ce même esprit de sécurisation des efforts de recherche européen, la Commission souhaite reconsidérer ses efforts d’ouverture à l’international ; travailler avec d’autres laboratoires du monde entier, oui ! mais à condition que ces coopérations scientifiques ne servent pas à développer des technologies qui se retourneraient contre les pays de l’UE à moyen ou long terme.

Certains pensent que ces initiatives sont trop vagues, d’autres les jugent trop molles ou sans les ressources nécessaires compte tenu de l’ampleur de la menace. Voyons dans quelques mois comment le nouveau Parlement européen, selon sa majorité, digèrera voire enrichira ces premières propositions.

 

Pour aller plus loin : 

Brève d’information – Le classement PISA 2023 dans la compétition mondiale des savoirs

Revoir – Un livre, un auteur : « L’Europe vue de l’intérieur » par Rudy Aernoudt

Antoine FERAL, Conseiller du Commerce Extérieur, Union Européenne

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