Date de la brève : 22 septembre 2023
Le vendredi 8 septembre dernier, en marge du sommet du G20 organisé par l’Inde et à deux mois de la tenue de la COP28 à Dubaï, l’Organisation des Nations Unies a rendu public le premier rapport d’évaluation de l’accord de Paris de 2015. Cet accord international, communément désigné sous le terme de « Global Stocktake » dans le vocabulaire onusien, a été adopté en 2015 et ratifié par 197 nations. Son objectif fondamental est de contenir l’élévation de la température moyenne mondiale en deçà de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels. L’objectif révisé à ce jour vise à limiter cette élévation à 1,5°C d’ici à 2100, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre de 43% d’ici 2030 et de 60% d’ici 2025[1].
Ces objectifs sont encadrés par des mesures financières, techniques et de renforcement des capacités. Ne pas les atteindre comporte un risque significatif d’aggravation des conséquences du dérèglement climatique, comme le mettent en garde les experts du GIEC.
La rédaction de ce rapport a impliqué des membres du groupe d’expert du GIEC. Par ailleurs, cette rédaction s’est appuyée sur les contributions nationales déterminées (NDC) que les pays ont dû présenter au début des années 2020, lesquelles précisent leurs objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Dès la première page de ce bilan mondial, il est affirmé que les pays du monde entier doivent « en faire beaucoup plus, maintenant, sur tous les fronts », soulignant ainsi l’urgence d’une action accrue. De plus, il est précisé que « la fenêtre se rétrécit rapidement », tout en rappelant que cette fenêtre constitue une possibilité tangible pour contenir le réchauffement à 1,5°C. Selon les conclusions des scientifiques, l’année 2023 nous place actuellement à une augmentation d’environ 1,2 degré Celsius au-dessus des niveaux préindustriels.
Ensuite, le rapport aborde la problématique des gaz à effet de serre (GES) et du dioxyde de carbone (CO2). Il rappelle en premier lieu que, conformément au rapport, « les émissions mondiales de GES doivent atteindre un pic entre 2020 et 2025 » avant de progressivement diminuer en vue d’atteindre l’objectif de réduction de moitié d’ici à 2050. Pour cela, il est impératif que les pays développés assument un rôle de leadership, afin que les Etats en développement puissent les imiter. Toutefois, en ce qui concerne les émissions globales de CO2, le rapport lance un avertissement sans équivoque en indiquant que les mesures actuellement en place ne sont « pas compatibles avec les objectifs » fixés pour chaque nation, concernant leurs contributions nationales déterminées.
Ce rapport met en lumière un autre point d’une importance capitale, soulevé pour la première fois par l’Organisation des Nations Unies : la nécessité de mettre fin à l’utilisation des énergies fossiles. L’ONU fait un appel catégorique à sortir définitivement de cette source d’énergie, comme indiqué dans le point 17 : « Pour parvenir à des émissions nettes de CO2 et de GES nulles, il faut transformer les systèmes dans tous les secteurs et dans tous les contextes, notamment en développant les énergies renouvelables tout en éliminant progressivement tous les combustibles fossiles. » De plus, dans ce même point, l’ONU insiste sur la nécessité de mettre fin à la déforestation, car son arrêt est intrinsèquement lié à la réduction de l’utilisation des énergies fossiles. Cela revêt une importance cruciale, car les forêts jouent un rôle essentiel dans la captation d’une part significative du dioxyde de carbone (CO2) présent à l’échelle mondiale.
En ce qui concerne la technologie, il est crucial de noter leur impact significatif sur le changement climatique et la transition vers une économie verte, comme le met en évidence ce rapport : « les technologies plus propres existantes doivent être rapidement déployées, tout en accélérant l’innovation, le développement et le transfert de nouvelles technologies, afin de répondre aux besoins des pays en développement ». En outre, d’un point de vue financier, il est impératif d’apporter des améliorations voire des réformes afin de rendre la finance plus efficace et inclusive, permettant ainsi à la finance de devenir un acteur clé du monde de demain. Comme le souligne, « la mobilisation à grande échelle du soutien à l’action climatique dans les pays en développement implique un déploiement stratégique du financement public international ». Par ailleurs, « L’accès au financement climatique dans les pays en développement doit être amélioré ».
Il est crucial que toutes ces améliorations nécessitent que les actions et initiatives prennent en compte l’ensemble des composantes de la société, y compris les segments les plus marginalisés de la société civile.
Enfin, le rapport tire une conclusion plutôt pessimiste en affirmant que « La communauté mondiale se trouve dans l’incapacité d’atteindre les objectifs à long terme établis dans l’Accord de Paris, en dépit des progrès collectifs accomplis. » Il met ainsi en évidence de manière franche la nécessité d’accélérer notre action.
Ce rapport fait écho aux propos du Président Emmanuel Macron, qui a exprimé un bilan plutôt contrasté à la sortie du G20, le dimanche 10 septembre 2023, en qualifiant les efforts et les ambitions pour atteindre les objectifs climatiques de « insuffisants ». Il a ensuite rappelé ce que pensent nombre de pays émergents en déclarant qu’« un discours trop facile s’installe chez certains émergents pour dire que seuls les pays les plus riches ont une responsabilité ». En outre, il a partagé ses inquiétudes quant à l’orientation actuelle des débats sur la question climatique en affirmant : « Je suis, pour ma part, très préoccupé de l’esprit qui commence à régner, y compris d’ailleurs au sein des membres du G20, sur la question du climat »[2]. En effet, le Président Emmanuel Macron juge qu’il existe un esprit revanchard de la part des pays émergents, mais également un esprit de négligence, voire d’indifférence sur la question climatique.
Pour toutes informations supplémentaires, le bilan des Accords de Paris est disponible en intégralité à cette adresse : https://unfccc.int/sites/default/files/resource/sb2023_09_adv.pdf
[1]Qu’est-ce que l’Accord de Paris ? Organisation des Nations unies. https://unfccc.int/fr/a-propos-des-ndcs/l-accord-de-paris
[2]Elysée. (2023, 10 septembre). Conférence de presse du Président Emmanuel Macron à l’issue du G20 de New Delhi. [Vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=MTWHxq55oT8
Pour aller plus loin :
Billet d’actualité – Sommet du G20
Brève d’information – Sixième rapport du GIEC
Revoir le webinaire – La COP 27 de Charm-el-Cheikh : quels enjeux pour l’Afrique ?
Emile DERIEUX, Chargé de mission, Fondation Prospective et Innovation
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